Lettre 39 Vers de nouvelles élections

Je vous avais expliqué que le parlement israélien, la Knesset, comptait 120 députés élus à la proportionnelle sur liste nationale.

Les dernières élections qui se sont tenues en avril ont vu deux partis le centre (Bleu-Blanc de Benny Gans) et la droite (Le Likoud de Netanyahou) arriver ex-æquo chacun recueillant 35 sièges.

La droite ayant visiblement la possibilité de constituer une coalition de 65 sièges, donc une majorité forte, le Président de l'état Mr RIVLIN a confié à Bibi Natanyahou mandat de constituer le gouvernement.

Le délai pour signer des accords de coalition expire ce soir à minuit mais jusqu'à présent, Bibi n'a réussi qu'à rassembler que 60 sièges. 

En effet le parti de droite Israel Beiteynou de Mr Avigdor Libermann refuse contre toute attente d'apporter ses cinq sièges au motif qu'il n'accepte pas les exigences des partis religieux auxquels, selon lui, Natanyahou cède de façon inacceptable.

Libermann et Bibi après la victoire aux élections

Sachez que les partis religieux ont obtenu 16 sièges et que c'est grâce à eux que Bibi peut prétendre à la formation d'un gouvernement.

Le système électoral à la proportionnelle qui ressemble à celui détestable de notre quatrième république, force le premier ministre à des compromis, voire des compromissions par des marchandages sans fin.

Libermann qui a occupé divers postes ministériels depuis 2001 a démissionné de son poste de ministre de la défense le 16 novembre dernier en raison d'un différent avec Natanyahou auquel il a reproché la conclusion hâtive d'un cessez-le-feu avec le Hamas qui règne à Gaza , accord sans contrepartie qualifié de "capitulation devant le terrorisme".

Rappelons entre autre que le Hamas de Gaza détient en otages deux civils israéliens ainsi que les dépouilles de trois soldats qu'il refuse de restituer aux familles.

Avigdor Libermann est connu pour ses prises de positions anti-arabe estimant que les citoyens arabes-israéliens ne sont pas fidèles à leur pays. Il milite pour l'institution de la peine de mort contre les terroristes.

Bref il dirige un parti que l'on peut classer à l'extrême droite selon les critères politiques français.

Quelle est la marge de manœuvre de Bibi ?

Un gouvernement de 60 sièges ne teindra pas la route, même s'il y a un précédent.

Rebattre les cartes et obtenir des partis religieux qu'ils acceptent le dictât de Libermann: Revenir à la loi sur l'incorporation des jeunes religieux orthodoxes telle qu'elle avait été présentée à la Knesset sans aboutir.

Scénario peu vraisemblable.

La loi prévoit qu'au terme du temps imparti, Natanyahou doit déclarer forfait, après quoi le président de l'état a la possibilité de charger un autre député de former une coalition gouvernementale, avec une éventuelle troisième tentative.

Il peut s'agir de n'importe quel député y compris du Likoud ou par exemple Libermann.

A défaut, le peuple retourne aux urnes.

Jusqu'à formation d'un nouveau gouvernement, les ministres sortant poursuivent leur activité.

Nous sommes en pleine expectative.

Chacun campe sur ses positions. Il ne reste que quelques heures pour dénouer le "plonter".

La gauche lance une grande protestation populaire contre Natanyahou lequel a exigé des partis entrés dans sa coalition qu'ils acceptent de voter une loi rétroactive qui lui accorde l'immunité dite "à la française" pour les quatre dossiers pénaux dans lesquels il est embourbés.

Il s'agit pour lui d'éviter la prison, ni plus ni moins.

A priori, Libermann ne s'intéresse guère à cette question, il est tout simplement obsédé par l'influence grandissante des partis religieux.

Il se dit pour un état juif, mais contre un état par trop soumis aux lois religieuses. Le distinguo est subtil, mais il peut être apprécié par une parti du peuple lequel comprend une part non-négligeable d'antireligieux.

Pour éviter le scénario du plan B à savoir se démettre de son mandat et voir un autre prendre sa place pour former un gouvernement, Natanyahou propose à l'assemblée de se dissoudre par vote majoritaire et couper l'herbe sous le pied à d'éventuels candidats. 

Un vote devrait avoir lieu en cours de journée.

Si personne ne cède, il y aura de nouvelles élections fixées au 17 septembre.

Netanyahou craint que Libermann en sorte renforcé de ce bras de fer, aussi il fait dès à présent des promesse en direction de la population d'origine russe qui est la base de l'électorat de son adversaire du jour.

Personne n'avait envisagé ce coup de théâtre!

Libermann est l'homme fort du moment. Ou l'empêcheur de tourner en rond !

Bibi est connu pour céder à toutes les pressions et tourner sa veste.

La balle est dans le camp des orthodoxes mais ils savent qu'en l'état actuel, nulle coalition n'est viable sans eux.

Il faudra donc que les nouvelles élections apportent un rééquilibrage des forces en présence.

La démocratie poussée à son extrême par le truchement du régime parlementaire à la proportionnelle est décidément paralysant, ce à quoi précisément le grand Charles voulait mettre fin par la constitution de 1958.

Nous serons fixés demain matin.