Lettre 65 Putsch à la Knesset


Les élections de la 23ème Knesset n'ont pas apporté de grands changements si ce n'est que le parti arabe unifié en est sorti renforcé avec un score historique de 15 mandats au lieu de 10.

Ce parti est fondamentalement hostile au Likoud de Natanyahou considéré comme xénophobe et colonisateur.

Le parti de centre gauche Bleu-Blanc dirigé par Benny Gantz s'est rapproché du parti arabe pour tenter de former une coalition et atteindre une majorité de 61 députés.

Malgré la défection ici ou la de quelques députés au seing même de Bleu-Blanc qui refuse cette alliance "contre nature", Gantz soutenu par 61 députés a été choisi par le Président de l'état pour tenter de former le gouvernement .

Rappelons que jusque là, c'était Natanyahou qui avait été désigné en premier car considéré comme le mieux placé pour obtenir une majorité. Mais il avait échoué aux deux précédentes tentatives pour s'être heurté au refus obstiné de Libermann, l'homme de droite qui voue une rancune obsessionnelle contre Bibi.

L'électron libre Libermann a fini par se rallier à Benny Gantz en mangeant son chapeau acceptant former une coalition avec le pari arabe honni.

Réalisme oblige, il est clair que rien ne peut plus se faire à gauche sans le parti arabe. L'échiquier électoral classique s'en trouve bouleversé.

Mais quelle sera la contre-partie du soutien du parti arabe.  

Et qui sont-ils vraiment ?

Israël: moisson «historique» pour les partis arabes aux législatives
Ayman Odeh chef de la «Liste unie» 

Historiquement, la Palestine ottomane était une province déshéritée où cohabitaient des populations arabes majoritaires aux côtés d'une petite communauté juive ancestrale représentant moins de 5 %.

A la fin du 19ème siècle, les juifs d'Europe centrale fuyant les pogroms ont émigré vers la Palestine dans un flot continu fondé sur une idéologie du retour à Sion.

La chute de l'Empire ottoman en 1918 et son démantèlement corrélatif  a permis la création d'un foyer national juif sous l'égide du mandat confié par la Société des nations à la couronne d'Angleterre. C'est la fameuse "déclaration de Balfour".

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L'émigration juive va se renforcer avec la montée du nazisme dans les années 30 et après guerre par les rescapés de la Shoa.

La guerre israélo-arabe de 1948 provoquera la fuite massive des deux tiers de la population arabe de Palestine vers les pays arabes voisins laquelle ne reviendra pas en raison de la création de l'état d'Israël.

Le tiers qui est resté vit dans des villes et villages séparés de la population juive (à l'exception de quelques villes "mixtes") avec citoyenneté israélienne pleine et entière mais exempté du service militaire.

 Les arabes israéliens représentent aujourd'hui 18% de la population et jusqu'alors ils boycottaient les élections.

Ils étaient partagés entre la solidarité avec les Palestiniens et l’adhésion à l’Etat d’Israël, entre la participation et le rejet du système parlementaire.

La liste arabe unie est composée notamment du parti nationaliste Balad lequel conteste le caractère juif de l'état d’Israël et milite pour le droit au retour des palestiniens qui ont du fuir  lors des différentes guerres.

Ce parti a été interdit de participation aux élections en 2009 motif pris qu'il ne reconnaissait pas l'état d’Israël et appelait à la lutte armée contre lui. Mais la cour suprême a annulé cette décision.

Certains membres de ce parti  sont soupçonnés de soutien au terrorisme ou d'activités subversives.

C'est dans cette ambiance mi-sulfureuse que le Likoud crie au scandale face à l'alliance du centre-gauche avec la liste arabe unie et que Bleu-Blanc appelle à l'union de la totalité de l'échiquier politique sans exclusion face à la crise du Corona virus.
Mais si ce parti arabe apporte son soutien à Benny Gantz, il n'entend pas participer à son gouvernement lequel serait donc minoritaire tout en pouvant compter sur ses voix à la Knesset.

Désormais la bataille fait rage et la session d'ouverture  de la Knesset a tourné court, son Président Yuli Edelstein (Likoud) ayant décrété après un court discours qu'il suspendait les débats jusqu'à constitution d'un gouvernement. 

En réalité, la session plénière doit désigner son nouveau président et Edelstein voudrait éviter de scier la branche à laquelle il s'accroche désespérément. 


Yuli Edelstein Président de la Knesset

La situation est tendue puisque le premier projet de loi porté par l'énigmatique Libermann n'a d'autre but que de mettre hors jeu un député mis en accusation, ce qui mettrait fin de facto à la carrière politique de Bibi.

Le monde politique est en émoi face à ce putsch permanent du Likoud, lequel utilise tous les moyens pour préserver son dirigeant des foudres de la loi.

Voilà exactement un an qu'Israël est dépourvu de gouvernement issu des élections et que se perpétue une situation politique inédite où un gouvernement dit "de transition" continue à gérer le pays confronté à une crise sanitaire sans précédent.

Le Président de l'état Rivlin a exhorté le monde politique d'éviter une quatrième élection mais décidément, Israël est à un tournant de son histoire: Le parti arabe sera-t-il pour la première fois partie prenante  à une alternance.

Il faut dire que le plan du siècle défavorable aux palestiniens a été un élément déclencheur de leur participation massive aux denier scrutin sans éluder leur volonté unanime de faire tomber Bibi.

Il reste à souhaiter que la population arabe israélienne se sentira davantage intégrée et ne restera pas à la remorque d'une société démocratique qui s'est jusqu'alors satisfaite de leur mise à l'écart qu'elle soit volontaire ou non.

Le sujet est sensible car une partie importante du pays y voit un danger de libanisation.

Certains et non des moindres y voient un parallèle en France. Mais ceci est une autre histoire.











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