>Lettre 64 Troisième tour sans changement



Attachez vos ceintures !!

Israël n'est pas une république mais une démocratie parlementaire dont les députés au nombre de 120 sont élus à la Knesset à la proportionnelle.

Un parti doit donc obtenir 61 mandats pour pouvoir former un gouvernement, le chef de parti occupant le poste de premier ministre.

En raison de la multiplicité des partis présentant des listes et de la division des voix qui en découle, le parti arrivé en tête doit généralement constituer une coalition pour réunir au moins 61 députés.

Pour y aboutir, le futur premier ministre doit offrir aux partis coalisés des portefeuilles ministériels fonction de leur importance ou de leurs exigences.

Curiosité de ce régime, les ministres cumulent leur fonction avec celle de député et portent donc deux casquettes.

C'est le système qui fut en vogue sous la IVème république avec ses avantages et surtout ses faiblesses.

Pourquoi trois cessions de votation ?

Une partie du peuple est remontée contre la personnalité et la politique de Netanyahou et en raison de l'effondrement de la gauche, un nouveau parti (Bleu-Blanc) est né par l'union de Benny Gantz et Yaïr Lapid, classés au centre de l'échiquier politique.

Aux deux élections précédentes, le Likoud et Bleu-Blanc sont arrivés au coude à coude (34 mandats chacun) sans pouvoir constituer une majorité par voie de coalition avec les petits partis.

La raison en est simple: Avigdor Libermann bien que classé à droite, a refusé d'apporter ses 7 mandats au Likoud motif pris de son refus de s'allier aux partis religieux constituant le bloc de droite.

Il a également refusé de l'allier à Bleu-Blanc motif pris de leur alliance obligée avec le parti arabe (13 sièges).

Son refus place ces deux coalitions dans l'impasse.

Libermann devenu le passage obligé pour former une coalition majoritaire se mure dans le silence et ne dévoile rien de ses exigences. Mais il est bien décidé à éviter un quatrième tour.

Quant à Benny Gantz il a refusé de s'allier avec le Likoud si Netanyahou visé par trois chefs d'inculpation demeurait à sa tête.

Toute la campagne s'est réduite à des invectives personnelles, le Likoud reprochant à Bleu-Blanc de "vendre" le pays au parti arabe donc aux palestiniens, Gantz pointant du doigt la malhonnêteté de Bibi et la défense de ses intérêts judiciaires personnels au détriment de ceux de l'état.

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Benjamin Netanyahou et Benny Gantz face to face

Ce qui est sûr, c'est que dans quelques jours devrait s'ouvrir le procès de Netanyahou lequel a retiré sa demande d'immunité laquelle n'avait aucune chance d'être acceptée par la Knesset.

Cet événement n'a en rien découragé ses électeurs. 

Malgré toutes les casseroles qu'il traîne, une épouse connue pour tyranniser son personnel, un fils aux turpitudes multiples, plus d'un tiers du peuple le soutient ne voyant que ses succès en politique sécuritaire et extérieure.

Et ses succès ne sont pas des moindres. Il a noué des relations diplomatiques avec les pays les plus inattendus y compris parmi les pays arabes. Le plan du siècle est compris comme le soutien inconditionnel de Trump à Bibi même si le but est purement électoral.

Il discute d'égal à égal avec Poutine et même si certains y voit une alliance avec les despotes internationaux, son électorat n'en a cure.

Progressivement quelques ambassades regagnent Jérusalem.

Sur le plan sécuritaire, il se positionne en rempart face aux menaces perpétuelles dont il se joue avec dextérité. Si le peuple a peur à juste titre, Netanyahou a réussi le tour de force de le persuader que lui seul est à même de juguler la menace et non les trois anciens chefs d'état major tête de liste de Bleu-Blanc.

Toutes les tentatives de déstabilisation, y compris dans son propre camp (On se souvient de l'exigence de Gideon Saar de tenir des primaires au Likoud) ont été suivies d'un soutien inconditionnel au "roi Bibi".

Impressionnant.

Quant à ses affaires pénales, son électorat épouse la diatribe de Netanyahou contre le gouvernement des Juges : "Tous pourris et vendus à la gauche".

Mais vox populi vox dei.

Voici les résultats définitifs de ce troisième tour:

Likoud: 36 sièges
Bleu Blanc: 33 sièges
Liste commune arabe: 15 sièges
Judaïsme unifié de la Torah: 7 sièges
Shass: 9 sièges
Avoda-Meretz-Gesher: 7 sièges
Yamina: 6 sièges
Israel Beteinou: 7 sièges

Soit 58 sièges pour le bloc de droite, 55 sièges pour le centre-gauche et la liste arabe, et 7 sièges pour Libermann qui ne se positionne pas.

Albert Einstein avait dit: "La folie c'est de faire toujours la même chose et de s'attendre à un résultat différent."

Les israéliens seraient-ils devenus fous ? Ne voient-ils pas que l'impasse dans laquelle se trouve le pays provient de deux obstinations: Celle de la moitié du pays qui exècre Bibi et refuse toute compromission et celle de Bibi qui refuse de passer la main alors qu'il se trouve par trois fois dans l'incapacité de constituer une coalition.

Dans l'immédiat Netanyahou cherche à débaucher trois députés d'opposition pour atteindre 61 sièges. Il avait déjà tenté cette manœuvre sans succès. 

Non bis in idem.

Le 10 mars, les résultats définitifs seront présentés au Président Rivlin lequel disposera alors d'un délai de 7 jours pour consulter les chefs de parti et choisir celui qui serait le plus à même de former une coalition lequel disposera de 28 jours augmentés de 14 jours si nécessaire.

Si Netanyahou est choisi donc au plus tard le 17 mars, l'opposition saisira à coup sûr la Cour Suprême pour tenter de le faire disqualifier en raison de sa mise en accusation.

Et en même temps, les avocats de Netanyahou auront saisi le tribunal pour tenter de faire reporter son procès fixé au 17 mars (pur hasard du calendrier ! ) avec pour argument qu'on doit pas perturber la bonne marche du protocole électoral, démocratie oblige.

On voit mal les juges refuser. Le procès serait ainsi repoussé et aucune loi n'autorise la haute cour à invalider un candidat présumé innocent.

Mais ce serait une première. A moins qu'au nom de la morale ou de l'éthique, les juges prennent leur courage et leur destin à deux mains.

Voilà un scénario plausible au lendemain des élections.

L'autre scénario serait que Gantz soit choisi à supposer qu'au préalable Libermann donne son accord pour siéger avec la gauche mais le soutien de la liste arabe n'est pas acquis.

Ou alors on devient encore plus fou et on repart pour une quatrième votation en espérant qu'Einstein a tord. Ces élections se tiendraient d'ici quelques mois.

Entre temps, le roi Bibi sera peut-être tombé. Les Juges ne rigolent pas avec la corruption.

A moins que cela ne soit qu'un horrible cauchemar. "Et pourtant elle tourne...." et pendant ce temps Bibi reste aux commandes comme premier ministre d'intérim.



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