Lettre 78 L'accord de paix des enfants d'Abraham

 Souviens toi d'Abraham !

Un accord historique signé de ce nom biblique nous renvoie à notre identité commune.

Mais qui était-il ?

Né en Mésopotamie (Irak), à une époque reculée où le polythéisme était roi, il était le fils d'un artisan fabriquant des idoles. Comme il s'interrogeait sur les vertu que ses congénères accordaient à ces statues de pierre, il décida un beau matin de les saccager pour en tester les réactions. Mais, ainsi qu'il le supposait, rien ne se produisit et il fut convaincu que seul un être supérieur et unique pouvait être le maître du monde.

Il venait de découvrir le dieu unique. C'est donc le père du monothéisme et de lui découleront les trois religions monothéistes qui le reconnaissent comme tel.

Sarah, l'épouse d'Abraham ne pourra avoir d'enfant de sorte qu'il aura un premier fils Ismaël avec la servante Agar.

Puis de façon plus que miraculeuse, Sarah enfantera Isaac à un âge  avancé. Elle chassera sa servante avec Ismaël lequel est considéré comme le père de la nation arabe.

La descendance d'Isaac fondera le peuple hébreu.

L'épreuve du sacrifice de son fils Isaac exigé par dieu et de l'ange qui retient sa main et lui désigne un bouc comme seul holocauste est honoré à la fois par la religion juive et arabe (Fête de l'Aïd).

Image associée

L'ange retient la main d'Abraham prêt à sacrifier Isaac

L'accord conclu cette semaine par les Emirats Arabes Unis avec Israël s'inscrit dans ce contexte biblique des fils d'Abraham, père des Nations, symbole de deux frères qui ne sauraient s'affronter éternellement.

Mais qui sont exactement ces Emirats ?

En deux mots comme en dix, un état fédéral créé en 1971 composé de sept émirats dont les principaux sont Abou Dhabi et  Dubaï avec une population totale de 10 millions d'habitants dont 90 % d'immigrés.

 Monarchie constitutionnelle de langue arabe et de religion musulmane majoritairement sunnite hostile aux frères musulmans et ayant pour ennemi juré l'Iran et dont l'allié principal est son voisin l'Arabie Saoudite et les USA comme de bien entendu.

Ce richissime petit pays pétrolier se livre contre l’Iran à une guerre par procuration sur plusieurs théâtres d'opération: Liban, Libye, Irak, Syrie, Afghanistan, Pakistan et surtout au Yémen dont le conflit s'enlise.

Une guerre entre les États-Unis et l'Iran ? – Yves Montenay

Cette carte offre un point de vue stratégique sur les forces en présence: Turquie et Iran au nord, Israël, Jordanie Arabie Saoudite et Emirats au sud.

Entre les deux axes, un vaste terrain instable: Liban, Syrie, Irak convoité par l'Iran ou la Turquie. Il se joue ici une partie de poker menteur sous l’œil attentif de Poutine,  et le désistement de Trump.

Jusqu'à présent, les états arabes s'entendaient pour tenir une ligne claire envers le trublion israélien: "Une normalisation des relations après le règlement du conflit palestinien".

Israël au contraire soutenait que la question palestinienne ne pouvait se solutionner que dans un contexte de paix durable avec ses voisins arabes lesquels jusque là prônaient sa destruction. 

L'accord historique épouse cette seconde alternative.

La raison en est simple: Israël n'a cédé à aucune pression ou menace et après 70 ans de guerre froide le monde arabe s'est fatigué face à l'entêtement des palestiniens  à refuser toute proposition.

Autre élément: Israël est le seul pays voisin disposant de l'arme atomique face à un Iran en passe de l'obtenir.

Plus insidieusement, le chiffon rouge que représentait l'ennemi sioniste ne fonctionne plus. Il suffit d'écouter le peuple libanais en colère s'exclamer "Mais en quoi le combat contre Israël doit-il représenter une cause nationale ?" 

L'Egypte et la Jordanie l'on compris depuis belle lurette et ont signé des accords de paix. Certes ces deux pays ont installé leur ambassade à Tel-Aviv et non à Jérusalem, mais depuis que l'Amérique a déplacé la sienne à Jérusalem, nombre d'autres pays sont en voie d’emboîter le pas.

Ce protocole de normalisation des relations est fustigé par la Turquie et bien sûr l'Iran  lesquels considèrent que  les Emirats ont donné un coup de poignard dans le dos des palestiniens.

D'autres pays arabes modérés approuvent ce revirement (Oman, Bahreïn, Egypte). L'histoire est en marche, rien ne l'arrêtera, et ce ne sont pas les rodomontades iraniennes qui changeront les choses.   

Les palestiniens seraient-ils l'autre fils d'Abraham immolé sur l'autel de la realpolitik moyen-orientale et quel ange viendra-t-il à son secours. 

La donne a changé et les palestiniens n'ont plus aucune bonne carte dans leur jeu. Même si l'accord prévoit que la normalisation des relations suppose un abandon de l'annexion de tout ou partie de la Palestine, on sait la valeur qu'il faut accorder aux conditions restrictives face à l'usure du temps.

Demain Israël va ouvrir une ambassade à Dubaï, El Al va y poser ses avions et un flot de touristes israéliens va envahir  ce royaume où l'argent est roi. Une synagogue est déjà en construction.

L'Abrahamic Family House, qui doit être construite à Abou Dhabi, Émirats arabes unis. (Autorisation du Haut Comité pour la fraternité)

Site multiconfessionnel incluant une synagogue à Abou Dhabi

A quand une coopération militaire et de hi-tech ? L'alliance de l'or noir et de la matière grise. 

Et la France dans tout ça ? La diplomatie française qui n'a rien vu venir salue "un état d'esprit nouveau" sans oublier de le lier aux possibilités de faire avancer les négociations pour la création d'un état palestinien.

Macron pense-t-il vraiment que c'est dans cet esprit que les Emirats se sont rapprochés d'Israël!! Alors qu'en même temps, il est allé s'ingérer dans les affaires libanaises sans ignorer pas que rien ne peut bouger sans le feu vert de l'Iran lequel tient ce pays en otage pour servir sa politique expansionniste.

Coup de pub mais coup d'épée dans l'eau.

Il faudra tôt ou tard choisir son camp: Avec ou contre l'Iran, telle est l'équation que les Emirats viennent de mettre en perspective.

L'Europe est contre Trump et pour l'Iran. Elle se tait face au drame libanais comme elle jette un voile pudique sur beaucoup  d'autres drames par idéologie d'opérette. 

Pas étonnant que son influence se réduit à peau de chagrin.



Commentaires

  1. Bonjour, Henri,
    Je ne suis pas souvent d’accord avec ce que tu écris, mais aujourd’hui oui!
    A l’exception d’une précision que je me permets d’apporter. Il n’est pas question d’ « abandon » de la souveraineté Israélienne sur une partie de la Judée Samarie comme le prévoit très explicitement le plan Trump, mais d’une suspension temporaire comme cela a été clairement précisé.
    Albert LEVY
    Herzliya

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