Lettre 79 Les dessous de la normalisation avec les pays arabes

 L'accord souscrit avec les Emirats est tripartite. Trump n'est pas un simple intermédiaire, mais intervient dans l'intérêt bien compris de son pays.

Qui saurait l'en blâmer! América first.

En apparence, cet accord Israël/Emirats présenté comme historique entre deux pays qui ne sont pas en guerre, prévoyait la normalisation des relations contre l'abandon par Israël de sa décision d'annexion d'une partie de la Palestine.

On était presque surpris qu'après son annonce tonitruante d'une annexion critiquée notamment par le monde occidental, Bibi avait mis la pédale douce jusqu'à temporiser alors précisément qu'on avait compris qu'il lui fallait agir tant que Trump était aux manettes.

En coulisse, les négociations devaient aller bon train. 

Mais on peut aussi imaginer que cette application unilatérale du plan du siècle par Natanyaou n'avait d'autre but que de permettre aux Emirats de présenter l'accord de normalisation comme un échange acceptable pour le monde arabe: La normalisation contre l'abandon de l'annexion. 

Jusque là tout va bien!

Et puis patatras, on apprend qu'en fait, la contrepartie c'est la renonciation d'Israël à l'embargo de la vente d'armes sophistiquées américaines aux pays arabes et plus précisément du golfe persique.

מטוס F-35

F35 sans pilote de dernière génération

New deal oblige. Les Emirats font faire l'acquisition d'armes sophistiquées pour un marché de plusieurs milliards de dollars. 

Les commandes étaient dans les tuyaux mais jusqu'alors bloquées par l'opposition d'Israël en vertu d'un accord implicite aux termes duquel les USA s'engagent à lui maintenir une supériorité qualitative des armes.

Et l'annexion alors ? Une renonciation apparente mais pas vraiment sine qua non ? Simple prétexte à faire avaler à tous des couleuvres ?

Et l'Europe à l'instar de la France qui s'est fendue d'un soutien à cet accord doit se sentir Gros-Jean comme devant alors qu'en fait les trois larrons ont chacun tiré les marrons du feu dans un secret le plus total.

Macron selon son habitude s'est empressé de s'exprimer: «Je souhaite qu'elle contribue à l'établissement d'une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens», aurait-il déclaré au Président Trump, au Premier ministre Netanyahou et au Prince héritier Mohamed bin Zayed».

Ils ont du bien rire ces marchands d'armes et de pétrole. 

Vanité des vanités, tout est vanité dit l'Ecclésiaste..... tout est futile, illusoire, ce qui a été sera ...(Qohelet, un des livres de la Bible). Nous y voilà, le sage se tait et attend.

D'où vient ce pacte dénommé QME (Qualitative Military Edge) conclu entre Israël et son ami américain ?

"Le QME est un calcul que la Maison Blanche est tenue de prendre en compte par une loi de 2008, lors des transferts d’armes vers le Moyen-Orient afin d’assurer qu’ils ne déséquilibrent pas l’avantage militaire qualitatif accordé à Israël. Ce privilège octroyé à l’État juif existe dans les faits depuis sa création, et fut par la suite expressément énoncé en doctrine par Ronald Reagan avant d’être formalisé par la législation. » (Sources: CAIRN INFO 2016/2)

Interrogé sur cette entorse à cette règle, Natanyaou répète à l'envi qu'il n'est pas question de revenir sur cette limitation de la vente d'armes à ses ennemis.

Mais convenons que la plupart des pays pétroliers du golfe persique entretiennent depuis près d'une décennie des relations secrètes avec "l'entité sioniste" devenues secret de polichinelle.

Deux dictons méritent d'être médités:

* Les ennemis de mes ennemis sont mes amis

* Si tu veux la paix prépare la guerre

Si la menace iranienne est prise par dessus la jambe par l'Europe, elle trouve sa pleine expression en Arabie Saoudite  laquelle a rompu ses relations diplomatiques avec Téhéran, les deux pays se livrant à une guerre militaire au Yémen par milices interposées.

Comprendre le conflit au Yémen en 5 minutes - YouTube


Blague à part, et même si on n'en parle guère, aurait-on oublié que la seule puissance qui possède l'arme atomique au Moyen-Orient c'est Israël. Et par les temps qui courent pourquoi se priver d'un tel allié même si sur certains sujets, le monde musulman est gêné aux entournures. 

Mais c'est un accord gagnant/gagnant.

Trump engrange pour la première fois un succès en politique extérieure et des pétrodollars.

Ryiad et Abou Dhabi vont pouvoir acquérir un armement sophistiqué à la hauteur de leurs moyens financiers.

Et Israël dans tout ça ?

Les forces de l'axe contre l'intégrisme s'enflent par l'arrivée de poids-lourds régionaux. Il sera bientôt difficile de trouver un terrain à Jérusalem pour accueillir toutes ces ambassades. 

Quand aux palestiniens, ils peuvent hurler dans le désert à la trahison. Il n'y a guère que la Turquie et l'Iran qui les soutiennent. 

Soutien oh combien improductif puisqu'ils se retrouvent à nouveau alliés aux puissances hégémoniques infréquentables, la première en guerre larvée avec la Grèce, la seconde accablée de sanctions américaines.

Mais souvenez-vous que depuis plus d'un siècle, à chaque conflit, les palestiniens ont choisi le camp des perdants.

O tempora o mores disait Cicéron dans son oeuvre les Catilinaires, indigné par les mœurs de son temps.

Seuls les puissants ont le choix. Aux autres la portion congrue et les rogatons.





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