Lettre 143 Un monde bipolaire se dessine

 

Un train peut en cacher un autre.

La tournée de Joe Biden au Moyen-Orient semble passer comme une lettre à la poste, comme un non-scoop.

Mais que vient-il y chercher et qu'a-t-il à y gagner?

Joe Biden est en pleine déconfiture dans les sondages, et même dans les rangs des démocrates le choix de cet homme politique usé fait débat.

Mais si l'essence à 2 euros crispe les Français, le litre de carburant à 1,30 dollar (5 dollars le gallon) ne passe pas aux States. La hausse des prix est proportionnelle à la baisse de popularité du président.

C'est dans ce contexte qu'a été organisé le vol de l'aigle vers Djedda en Arabie Saoudite pour "supplier" le prince héritier d'augmenter la production de pétrole et faire ainsi baisser le prix du brut lequel plafonne à 120 $ le baril.

Mais une visite éclair à Canossa pour serrer la main du boucher qui a fait assassiner le journaliste Jamal Khashoggi n'était pas envisageable.

Une conférence au sommet dénommée I2U2 (Initiales des 4 pays ?!) a été organisée à Jérusalem avec pour participants outre Israël et les USA, l'Inde et les Emirats Arabes Unis dans le but de développer un partenariat dans l'agriculture et l'énergie.


Que nul ne s'y trompe! América is back!

Biden a avoué que le rapatriement des boys du théatre d'opération moyen-oriental était une erreur dans laquelle Russes et Chinois s'étaient engouffrés.

Son voyage a commencé par une visite oficielle de trois jours à Jérusalem dans le cadre des accords d'Abraham. 



S'il a prononcé les paroles d'usage de soutien inconditionnel à Israël et déclaré pour l'antépénultième fois que les States ne laisseraient pas l'Iran devenir puissance atomique, aucune menace sérieuse n'a été proférée, se contentant d'un recours désuet à la diplomatie.
Jusqu'ici il est clair que les Iraniens jouent la montre et font lanterner Biden. Le gendarme du monde parait bien désarmé.

Lapid a aussitôt rappelé que seule la pression armée pouvait faire plier le régime des Ayatollahs.

Bref un coup d'épée dans l'eau.

On sait ce que valent les déclarations d'intervention américaines sur le sujet: Elles ont été proférées contre tous les pays qui se sont dottés de l'arme nucléaire sans que jamais les USA n'aient mis leur menaces à exécution.

L'Iran sera donc dottée de l'arme atomique, c'est désormais une certitude. Et c'est bien ce qui inquiète les pays du golfe persique.

La visite de Biden passe par Ramallah où il doit rencontrer Abou Mazen pendant une petite heure.
La question palestinienne se mesure à l'aune du temps consacré. La portion congrue!

Puis il va se rendre en Arabie Saoudite quémander du pétrole. Mais l'accueil chaleureux qui lui a été réservé à Jérusalem risque de faire déchanter cet invité de marque en posant les pieds en terre d'Islam où il n'est pas le bienvenu.
Les Saoudiens ont peu goûté les invectives de Joe Biden contre le prince héritier dans l'affaire Khashoggi.

Mais nécessité fait loi. En serrant la main du prince héritier Mohammed ben Salmane, Biden a scellé la décadence de la première puissance mondiale.

Biden avait promis de faire de MBS un paria! Certes, devant les caméras il a déclaré avoir "dit son fait" au prince. Ce dernier aurait alors renvoyé l'Américain dans les cordes lui rappelant les méfaits commis en Afganistan ou en Irak.

Et le pétrole dans tout ça?

Comme dirait Michel Blanc: J'ai une ouverture...

Mais qui a donc intérêt à faire baisser le prix du baril ? Certainement pas les pays producteurs dont l'essentiel était présent à Djeddah.
Par contre l'Arabie Saoudite est au plus haut point intéressée par l'appui militaire américain pour contrer l'Iran. 

Si Israël n'a pu exiger de Biden qu'il montre les dents face à l'Iran, ce dernier devra faire mieux; baucoup mieux pour avoir plus de pétrole.

Mais Biden joue par ailleurs sur du velour. Il sait que l'Arabie Saoudite veut concrétiser la normalisation avec Israël dans le cadre des accords d'Abraham. Il pourra s'enorgueillir d'en être l'entremetteur auprès des électeurs évangélistes.

Déjà l'Arabie Saoudite annonce qu'elle ouvre son espace aérien à Israël, sans poser aucune condition.

La boucle est bouclée: Le Moyen-Orient s'aligne avec Washington dans un accord gagnant-gagnant.

On s'est réconcilié, c'est ce qu'il faut retenir.

Mais les choses ne sont pas si simples: Mardi aura lieu à Téhéran une rencontre entre le président iranien et Poutine en présence d'Erdogan. Pour contrebalancer la viste de Biden, ce trio souhaite améliorer les relations avec les Emirats Arabes Unis, voire renouveler les relations diplomatiques avec l'Egypte et la Jordanie.
En Arabie Saoudite, on exclut pas un tel rapprochement.

Chacun voit midi à sa porte.

C'est le panorama local.

Mais si on élève la caméra, il est clair que nous sommes entrés dans l'ère de l'affrontement Est -Ouest comme au bon vieux temps de la guerre froide avec comme corollaire le parapluie atomique américain des années 60.

Mais ça, on ne l'évoque qu'en filigrane en France. A quoi bon et puisque nous sommes fâchés à mort avec les Russes, il faut bien s'allier avec l'oncle Sam.

Mais cet allié fait face à un autre conflit en pleine efferfescence: La Chine de Taïwan.

Mais qui donc s'en inquiète? La République Populaire de  Chine (RPC), à l'instar de Poutine, a engagé un bras de fer avec les pays asiatiques de la mer de Chine et a envahi les îles inhabitées qui enserrent ses frontières maritimes.

La Chine souffre d'un enfermement maritime en raison de l'omnipotence américaine dans la région.



La 7ème flotte américaine ne bronche pas malgré les accords de défense passés avec les pays concernés. On ne va pas déclencher une guerre pour quelques rochers stériles. 

Mais ces "conquêtes" contraires au droit international permettent à la Chine de contrôler un espace maritime dévolu jusqu'alors aux pays alliés de l'Amérique, et d'y étendre son influence. La Chine interdit désormais cet espace maritime illégalement acquis tant aux pêcheurs étrangers qu'aux navires civils ou militaires.

Leur revendication est claire: reprendre le contrôle de Taïwan, territoire perdu après la seconde guerre mondiale mais toujours considéré comme la 23ème province de la Chine, laquelle refuse de reconnaître son indépendance.

Les forces de l'axe sont donc bien reconstituées: La Chine et la Russie contre les USA, alliés avec l'Australie, le Japon et l'Indonésie.

Biden tente d'y accrocher le wagon moyen-oriental avec Israël comme fer de lance tandis que l'Iran verse dans le giron sino-russe.

Le sultan turc a un pied dans chaque camp et attend qu'on le courtise.

L'Europe est à la remorque des USA, lesquels se servent de nous pour affaiblir les Russes. L'Ukraine n'est qu'un prétexte dans un conflit plus vaste, mondial, et qui annonce les prémices d'une guerre autrement dévastatrice.

Nota: La Chine dispose désormais d'une armée navale plus forte que l'US Navy. 

Elle vient de baptiser son 3ème porte-avions et disposerait de 40 sous-marins.

Ne parlons pas de l'armée de terre d'un pays de 1,4 millard de citoyens dévoués corps et âme à leur pays. 

Ceux qui ont oublié les combattants de la piste Ho Chi Minh en Indochine feraient bien de relire leur livre d'histoire. Ce sont des combattants dans l'âme, cruels et peu soucieux du respect des lois de la guerre. Le régime de Pol Pot (chef des Khmers rouges) en est un exemple si nécessaire. 

Le monde occidental, States en tête, demeure à leurs yeux le grand satan et le Japon l'envahisseur ancestral. Il y a de la revanche dans l'air!

L'hiver viendra avec son cortège de hausses et de restrictions. La guerre en Ukraine va devenir un poids. Les Russes ne lâcheront rien, Zelenski non plus. 

Aurons nous les reins solides dans ce pari hasardeux?

Joe Biden a déjà gagné une guerre, celle de la reprise en main de l'OTAN, laquelle n'aura le choix que de lui manger dans la main. Le doublon Shulz/Macron est déjà aux ordres.

Les camps sont dessinés. Il ne manque plus que l'étincelle pour enclancher le processus.

La guerre 14-18 avait commencé de la même façon.

L'histoire se répète et les hommes imaginent que les circonstances ont changé.

La guerre en Ukraine nous prouve le contraire. Lorsque les régimes totalitaires affrontent les régimes libéraux, le résultat ne fait aucun doute.

Ainsi, il y a fort à parier que Russie et Chine ont lancé chacun de leur côté un plan machiavélique dans lequel ils sont complices. L'invasion des territoires contestés et plus si affinité. La pythie vient en mangeant disait-on à Delphes.

Mais bien sûr c'est une fake news !!

Une bonne nouvelle dans ces spéculations: Le Moyen-Orient est en passe de se guérir de ses vieux démons. Les pays arabes s'affranchissent de la tutelle américaine et avancent à grands pas vers le modernisme. Israël devient le modèle à suivre.

Le parapluie atomique face à l'Iran.

La guerre se déplace et la paix s'installe.

Mais c'est la part de gâteau la moins bien partagée.

«Laissez donc la Chine dormir, car lorsque la Chine s'éveillera le monde entier tremblera»,prédiction prononcée, dit-on, par Napoléon en 1816 et citation reprise et actualisée par Alain Peyrefitte.

Sa gestion de la pandémie fait quelque peu froid dans le dos. Isn'it ?

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Lettre 189 Journal de guerre J+8

Lettre 229 L’UNRWA au service du terrorisme

Lettre 193 Journal de guerre J13+14