Lettre 141 Yaïr LAPID premier ministre

 Vous connaissez le jeu des chaises musicales.

Quand la musique cesse, il faut s'asseoir au bon endroit.

Mais celui qui a cédé sa chaise, est sorti du jeu politique.

Naftaly Bennett (A droite) cède la place à Yaïr LAPID

Netanyahu en avait fait les frais il y a un an lorsqu'il avait pour la quatrième fois échoué à former une coalition majoritaire. Il avait alors enfourché la chaise de chef de l'opposition.

Si le fauteuil était inconfortable, il n'avait eu de cesse que d'exercer une pression agressive envers les députés du clan du premier ministre Bennett pour les inciter à le rejoindre pour former un vrai gouvernement de droite.

Comprenez sans la gauche et les partis arabes.

Dans son dernier discour à la Knesset n'avait-il pas déclaré à la cantonnade: "Prenez un pseudo-parti de droite et mélangez le avec la gauche extrême et le parti arabe des frères musulmans, et voilà ce que vous obtenez".

Ce sera le thème récurrent de la campagne électorale qui vient de s'ouvrir: Avec la gauche et les partis arabes point de salut!

Mais ce ne sont ni la gauche ni les arabes qui ont fait tomber le gouvernement, mais quelques députés de la droite nationaliste du parti de Bennett qui ont trahi leur camp sous les coups de semonce et les promesses de Bibi.

Avoir accepté de former un gouvernement de coalition aux côtés de leurs opposants naturels leur a paru à terme insupportable.

Rappelons les faits.

Après l'échec de Netanyahu de former un gouvernement il y a un an, le Président de l'état avait mandaté Lapid dont le parti était arrivé en seconde position après le Likoud.

Lapid classé au centre-gauche, avait créé la surprise en s'alliant avec le parti de droite nationaliste Yamina dirigé par Bennett (6 mandats) en lui proposant le poste envié de premier ministre dans le cadre d'une rotation de deux ans.

Les accords de coalition prévoyaient qu'en cas de chute du gouvernement la rotation aurait lieu immédiatement. 

Face à la désertion de trois députés du groupe de Bennett, celui-ci n'avait pas hésité à appliquer strictement lesdits accords et fait voter la dissolution de la Knesset.

La passation de pouvoir a eu lieu dans la foulée, Lapid devenant le 14ème premier ministre de l'état d'Israël. Pour le moins jusqu'à la formation d'un gouvernement issu des prochaines élections qui auront lieu le 1er novembre. 

Bennett a aussitôt déclaré qu'il se retirait de la vie politique et qu'il laissait le soin à sa seconde, la trop belle Ayelet Shaked, le soin de prendre les rennes du parti Yamina.


La ministre de l'intérieur, Ayelet Shaked

Il faut dire qu'elle lui a donné du fil à retordre, elle qui n'a eu de cesse que de préparer une alliance avec Netanyahu en échange d'une place de choix dans un futur gouvernement du bloc de droite.

Mais les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent. Et Netanyahu n'en n'est pas avare.

Allons enfants de la patrie!!

Deux scénaries se dessinent:

1) Yamina obtient au moins 4 mandats et s'allie au Likoud et aux partis religieux pour former un gouvernement majoritaire: Netanyahu revient aux affaires.

2) Yamina échoue et disparait de l'échiquier privant le Likoud de voix qui lui revenaient naturellement et c'est l'échec.

La loi électorale prévoit en effet que seuls les partis obtenant au moins 4 mandats (sièges de députés) sont admis à la Knesset. A défaut, leurs voix sont réparties proportionnellement entre les autres partis.

Le gouvernement Bennett peut se féliciter de plusieurs acquis: Une économie qui a bien redémarrée après la pandémie, un calme inhabituel aux frontières, une bonne gestion de la crise en Ukraine, un retour à une meilleure entente avec la Turquie, quelques succès dans la crise iranienne et surtout, la concrétisation des accords d'Abraham et la normalisation avec certains pays arabes.

Mais l'Israélien moyen aura à nouveau à faire face à un choix cornélien: Avec Bibi sans les partis arabes, ou avec Lapid et une coalition de verre qui a démontré sa fragilité.

Il manque en Israël un Mélachon de gauche pour contrebalancer une droite qui n'a rien perdu de ses affidés malgré le procès pénal toujours en cours contre Netanyahu. 


Qui est-il ?

Né à Tel-Aviv le 5 novembre 1963, il est âgé de 58 ans. Son père, le journaliste politique Joseph Tomy LAPID, rescapé de la Shoah et ministre de la justice (2003-2004) il est le fondateur du parti laïque Shinouï opposant farouche aux partis religieux orthodoxes. 

Yaïr n'a pas fait d'études supérieures et n'est pas titulaire du Baccalauréat isaélien. Dans ses jeunes années, il fut un sportif de haut niveau, ceinture noire 3ème Dan de karaté, mode de vie sportif qu'il poursuit s'abstenant de toute consommation d'alcool et non-fumeur.

Lors de son service militaire, il est affecté à l'information puis à sa libération entre au journal "Maariv" où il écrit des textes littéraires. Puis journaliste pendant 19 ans au quotidien principal "Yediot Aharonot" qu'il quitte pour entrer en politique.

Il est l'auteur de 12 livres, 22 poèmes dont certains seront mis en musique, acteur dans plusieurs films, producteur et présentateur dans plusieurs émissions d'informations télévisées etc... 

Il fonde en 2012 le parti "Yech Atid" (Avenir) de tendance centriste mettant l'accent sur l'enseignement laïque et le combat contre la corruption.

Ministre du trésor en 2013 dans une première coalition menée par Netanyahu, ce dernier le destitue.

Aux dernières élections, son parti Yesh Atid obtient 17 mandats lui permettant de former un gouvernement de coalition dont il cèdera le fauteuil de premier ministre à Bennett.

Marié et père de trois enfants il habite Tel-Aviv.

Une fois par semaine, il emène sa fille autiste (Sans tambours ni trompettes) dans le restaurant italien où j'ai le privilège de le rencontrer. 

Homme d'une grande simplicité, sa fortune se limite à 25 millions de Shekels (7 millions d'euros).

On entre avec lui dans une ère nouvelle qui va trancher avec les usages politiques antérieurs.

Sa première visite comme premier ministre fut consacrée au mémorial de la Shoah Yad Vashem à Jérusalem dont son père fut administateur. 

Sa première visite officielle à l'étranger sera réservée à la France où il rencontrera Emmanuel Macron.

Puis il recevra Joe Biden en Israël.

L'agenda est déjà chargé, mais l'homme semble parfaitement soluble et adaptable dans un monde politique en pleine effervescence.

Il lui reste quatre mois pour prouver qu'il a la carrure d'un chef d'état.

Il peut d'ores et déjà défier Poutine (9ème Dan) dans un combat amical de karaté.


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