Lettre 154 Léon BLUM le patriote juif, sioniste et honni


Léon BLUM, homme politique surprenant à plus d'un égard.

                  

Juif de nationalité française ou Français de religion israélite. Chez lui, identité, convictions et origine s'entrechoquent.

Quand on dit qu'on est "né juif ", c'est en réalité... laisser entendre qu'on ne l'est plus.

Et pourtant, tout au cours d'une vie politique combative et accidentée, Léon Blum a revendiqué sa qualité de juif et, en 1950, quelques semaines avant sa mort, il affirmait sa foi sioniste.

La contradiction n'est qu'apparente.

"Je suis né à Paris, le 9 avril 1872, Français de parents français. Ma maison natale, 151, rue Saint-Denis, existe encore et chacun peut en voir, en passant, la façade étroite et pauvre... Aussi loin qu'il est possible de remonter dans l'histoire d'une famille plus que modeste, mon ascendance est purement française. Depuis que les juifs français possèdent un état-civil, mes ancêtres paternels ont porté le nom que je porte aujourd'hui."

Sa famille, du côté paternel, est originaire de Westhoffen, (Bas-Rhin) qui fut autrefois un centre juif assez important.

Son ancêtre Baruch Abraham prit, en 1808, lorsque les juifs français furent dans l'obligation de prendre un nom propre, le nom de Moïse Blum. Léon Blum en est le descendant. 

Du côté maternel, les Picart sont originaires de Ribeauvillé, où on retrouve en 1747 un Picart Salomon, l'un des aïeux de Marie Picart, épouse d'Auguste Blum, père de Léon Blum. Ce dernier vint se fixer à, Paris aux environs de 1848.

Si ses parents semblent avoir été pratiquants, Léon Blum ne l'est pas.

Il avait dans sa jeunesse une relation singulière avec le judaïsmeIl ne s’est jamais considéré comme un ‘Français israélite’ mais comme un Juif tout court : le mot même d’israélite est banni de ses écrits. Il prit toutefois rapidement ses distances avec la pratique religieuse.

Il est maître des requêtes au Conseil d'Etat lorsqu'éclatte l'Affaire Dreyfuss en 1894 et il s'engagera aux côtés de Jaures pour faire reconnaître l'innocence du capitaine.

S'il prit ses distances avec la pratique religieuse, il sera un sioniste convaincu de la première heure et militera pour que la France adhère à la Déclaration de Balfour par laquelle la Grande-Bretagne entendait favoriser la création d'un foyer juif en Palestine.

Devenu homme politique influent puis Président du Conseil, il fut la cible de toutes les villenies antisémites.

Charles Maurras, le plus déchaîné et furieux de tous ses ennemis, n’avait pas hésité à écrire, dans l’Action française du 9 avril 1935 : « C’est un homme à fusiller, mais dans le dos »

Cet appel explicite au meurtre n’allait pas tarder à être suivi de conséquences : Le 13 février 1936 sa voiture fut attaquée Boulevard Saint-Germain par des militants de l’Action française. Il fut gravement blessé à la tête et hospitalisé.


Il s'oppose de toutes ses forces à l'armistice et la honteuse collaboration orchestrée par Pétain lequel le fait arrêter et interner le 15 septembre 1940, sous l'accusation d’atteinte à la sûreté de l’État.

Une nouvelle affaire Dreyfuss commence!

Les Allemands l’incarcèrent au camp de Buchenwald. Son frère Robert est déporté a Auschwitz, d’où il ne reviendra pas.

A Berlin, on parle d’exécuter Léon Blum, mais les Américains arrivent en avril 1945.

De retour en France, il devient une nouvelle et troisième fois Président du Conseil en 1946, puis il se retire de la vie politique.

Quelle fut sa contribution à la création de l'état d'Israël ? 

En octobre 1926, Léon Blum assiste à Londres à la conférence économique sioniste où il se lie d'amitié avec Chaim Weizmann, futur premier président d'Israël. (1948)

En 1928, en coopération avec de grands dirigeants inspirés comme Arthur Rubinstein et Edouard Bernstein, il a créé le « Comité socialiste pour la Palestine »

En 1929, il entre à l'Agence juive pour la Palestine, comme représentant de la gauche non-sioniste et exalte, devant le congrès de Zurich de cette organisation, l'esprit de peuple juif.

En août 1929, Haïm Weizmann obtient de Léon Blum qu’il participe au seizième congrès sioniste à Zürich.

Weizmann intervint auprès de lui, en 1938, pour que les autorités françaises en charge du Liban expulsent le mufti de Jérusalem, affidé des nazis et réfugié à Beyrouth.

Léon BLUM fit part de toute son angoisse aux Anglais face aux perspectives sinistres ouvertes par le Livre blanc britannique sur la Palestine. (Délibération scélérate limitant drastiquement l'entrée en Palestine des juifs fuyant les nazis)

Après 1945, il est, dans ses fonctions politiques et gouvernementales, un artisan actif de la création  d'Israël et de sa reconnaissance sur le plan international.

L’intervention personnelle de Léon Blum fut déterminante lors des débats à l’ONU qui précédèrent le vote sur la résolution de partage de la Palestine, le 29 novembre 1947.

Alors que la politique traditionnelle du Quai d’Orsay penchait vers l’abstention, Haïm Weizmann sollicita Léon Blum qui réussit à convaincre le ministre Georges Bidault de faire voter en faveur du partage. 

Au printemps 1948, Léon Blum prit position avec énergie en faveur d’une proclamation immédiate de l’État d’Israël dès la fin du mandat britannique. 

Puis il participe à la construction de l'étroite alliance diplomatique, économique, militaire et technologique qui unit la France de la IVe République à l'État israélien.

On sait que de cette alliance naîtra une entraide militaire qui permettra à Israël de se dotter de l'arme atomique.

Après la guerre d’indépendance, peu avant sa disparition le 30 mars 1950, il se prononça en faveur du droit pour Israël de faire de Jérusalem sa capitale.

Homme d'honneur, digne et visionnaire, si l'Histoire ne se souvient de lui que comme l'auteur des congés payés, il a pesé de tout son poids pour la cause sioniste.



Mémorial Léon Blum au kiboutz Kfar Blum
oeuvre d'Avishaï Teicher , novembre 2008

En hommage à sa contribution à la cause sioniste, un kibboutz de Galilée fondé en 1943, est baptisé « Kfar Blum » (le village de Blum). Dès avant la Seconde Guerre mondiale, il avait exprimé sa fierté « en tant que Français, socialiste et Juif » que son nom soit associé à ce kibboutz.

Commentaires

  1. Albert Levy16/12/2022 11:53

    Merci pour ce rappel historique bigrement intéressant. Il est grand temps que la France renoue ses relations d’amitié et coopération intense avec Israël. Un premier geste fort pourrait être la reconnaissance de Jérusalem comme la capitale de l’état Juif. Ce qui est une évidence. Et l’installation de l’Ambassade de France en Israël à Jérusalem.

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    1. Mille fois d'accord, voir mon commentaire JW

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  2. Excellent article sur ce grand homme d'Etat, droit et honnête. SurBLUMi, CASSIN, MENDES FRANCE et d'autres devrait se pencher le Devoir de Mémoire.

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    1. L'"anonyme" a simplement oublié de signer! Jean Wertheimer

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