Lettre 161 Israël face à un changement de régime politique

 Ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain!

Israël, seule démocratie du Moyen-Orient est mise durement à l'épreuve. Mais les grands principes fondateurs qui ont présidé à la création de l'Etat sont inscrits dans le marbre. Le peuple juif s'est battu contre l'adversité pour faire revivre cette nation, refuge contre les persécutions.

Après avoir fait refleurir le désert, développé l'économie jusqu'à devenir la "Start up nation" puis  fournisseur d'énergie, est venu le temps de la crise de conscience. De la crise tout court!

Reprendre son souffle et décider du chemin à prendre dans un pays qui n'a connu que la guerre sans pouvoir prendre le temps d'une respiration spirituelle.

Et voilà qu'Israël se trouve à la croisée des chemins dans une équation politique infiniment complexe.

Cette jeune vieille nation a poussé sans tuteur. Il a fallu improviser à chaque instant, et faire face aux périls existentiels sans jamais perdre son âme afin demeurer dans le concert des nations civilisées.


Ben Gourion aux côtés de Golda

L'exercice demande une certaine force morale et mentale. David Ben Gourion, Golda Meir, Menahem Begin, Yitzhak Rabin ont tracé la voie et ce ne sont pas les chemins de traverses empruntés par Netanyahu qui vont égarer le peuple du livre.

Si ce peuple a un destin, il ne converge certainement pas vers le fascisme. 

Mais qui ne serait pas tenté après tant de vicissitudes de se laisser aller à la facilité d'une justice, d'une presse, d'une junte aux mains déliées du pouvoir.

Mais l'opposition populaire est dans la rue et a choisi comme symbole le drapeau blanc-bleu frappé de l'étoile de David.

Manifestants au centre de Tel-Aviv

Et il chante la chanson populaire "Je n'ai pas d'autre pays" rappelant ainsi le sens de son combat.

 https://www.youtube.com/watch?v=NxK8Dg72xds

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 L'équation peut se résumer à deux inconnues:

* Laïcs contre religieux fondamentalistes et nous sommes à la veille de la loi de 1905

* Forces libérales contre droite radicale 

Ajouter à cela un paramètre trop connu: Que faire des Palestiniens, cette population qui a le tort d'exister, voire de préexister et de se rappeler régulièrement aux bons souvenirs des pouvoirs en place.

Dans l'immédiat, il n'est question que de combat pour la démocratie et contre le totalitarisme. Un combat qui s'inscrit dans une légalité non-violente.

On entend les réactions les plus diverses.

Certains ne décolèrent pas et s'apprêtent à employer la force. D'autres dans le même esprit parlent de quitter le pays.

La notion de démocratie semble bien comprise dans un pays où la séparation des pouvoirs n'est que partielle s'agissant d'un régime parlementaire où l'exécutif et le législatif sont dans les mêmes mains.

Le danger est donc grand de voir ce pouvoir s'accaparer du pouvoir judiciaire, celui précisément qui tacle les lois excessives et met en prison les politiciens "audacieux".

Et que fera l'armée en cas de conflit plus musclé ?

Il faut bien l'évoquer puisque le marathon législatif se poursuit sans véritable débat malgré les incantations du président de l'Etat, les alertes des économistes les plus autorisés, les préventions du gouverneur de la banque d'Israël, les interventions étrangères et le désastre financier qui menace.

Netanyahu et ses sbires font la réponse du berger à la bergère: En tentant de torpiller une réforme nécessaire, ce sont les manifestants anarchistes qui causent du tort au pays. 

Déjà dans les rangs de l'armée, des réservistes bénévoles prennent position et refusent de servir un gouvernement taxé de fascisme. 

Là il y a danger et le chef de l'état major a appelé la troupe à ne pas politiser l'armée. Jusqu'à quand ?

La réforme judiciaire orchestrée par la majorité à la Knesset n'est autre qu'un changement de régime politique. Il suffit de prendre connaissance des projets de loi soumis actuellement à la Knesset:

* Incompétence de la cour suprême pour apprécier de la validité des lois fondamentales

* Nomination des juges par une commission aux mains de la majorité

* Possibilité pour la Knesset de revoter une loi après annulation par la cour suprême

* Incompétence de la cour suprême pour apprécier de la validité de la nomination des ministres, fussent ils corrompus comme Aryé DERY

* Enquête soumise au ministre de la justice et non au parquet concernant les délits commis par les membres de la Knesset

* Suppression de l'interdiction du conflit d'intérêt permettant à Netanyahu de s'impliquer dans la réforme judiciaire alors qu'il est concerné par ses procès en cours

* Peine de mort contre les terroristes

* Limitation du droit de regard des juges sur les lois ordinaires

Le point d'orgue n'est pas loin. Ces lois contestées destinées à museler le pouvoir judiciaire seront soumises à la signature de Président de l'Etat, formalisme permettant de les publier au bulletin officiel. Refuserait il ?

Certains ont même évoqué sa possible démission ce qui engendrerait une crise politique sans précèdent.

Rien ne va plus mais les jeux ne sont pas faits.

La démocratie c'est le respect du résultat des urnes et de la majorité qui en résulte au parlement.

Le débat se situe ailleurs: C'est le choix du régime politique qui est en cause et on ne peut se servir de la démocratie pour mieux l'étrangler.

La vox populi défendant la démocratie vaut toutes les majorités parlementaires. En France on ne le sait que trop bien.

Dans l'immédiat le combat semble inégal car le bulldozer législatif avance alors que le peuple ne peut que se soumettre ou prendre les armes.

Curieusement au même moment, le torchon brûle en Palestine et à l'approche du ramadan, la tension est extrême. Le dernier attentat a été suivi d'une expédition punitive de colons israéliens à l'instar de ce qu'on nommait "ratonnade" en Algérie.

Aucun membre du gouvernement n'a condamné les faits. pire encore, les colons se sentent soutenus par ce silence assourdissant.

Ceux qui ont voté pour ce gouvernement avec l'espoir de maintenir le caractère juif du pays et obtenir plus de sécurité en seront pour leur frais: Ils n'obtiendront ni l'un ni l'autre.

Dans toute tragédie il y a une bonne nouvelle. En sortant de cette épreuve, Israël s'en trouvera grandie.

Le tout c'est d'en sortir par le haut.

Netanyahu vient d'ouvrir la boite de Pandore en faisant alliance avec le diable. Tel Faust qui ne voit pas aboutir ses efforts, il veut obtenir une seconde vie politique au prix de son âme laquelle sera damnée pour l'éternité.

Mais ceci n'est qu'une simple allégorie.

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