Lettre 171 Tyrannie de la majorité
La réforme est morte, vive la réforme!
Voila plus d'un mois que Netanyahu avait suspendu les projets de loi qui avaient soulevé un vent de révolte intérieure et la désapprobation internationale.
A tel point que le Shekel battait de l'aile provoquant une inflation que la banque nationale tentait de juguler par une hause drastique des taux d'intérêts bancaires.
Pendant cette pause législative, les négociations se poursuivaient sous l'égide du Président Herzog pour trouver un compromis. Mais la démocratie ne se négocie pas, elle ne se saucissonne pas.
Il a bien fallu constater qu'un accord était impossible.
La discorde devait se cristalliser sur la composition de la commission chargée de la nomination des juges, notamment du Président de la Cour Suprême.
Il était d'usage qu'un membre de la coalition et de l'opposition soit désigné aux côtés de autres membres désignés par le barreau et les juges.
Les membres du Likoud étaient divisés sur cette question, certains exigeant que la tradition soit respectée et qu'un député de l'opposition soit désigné ce qui risquait de priver la coalition d'une majorité dans ladite commission.
Lors du vote (anonyme) à la Knesset, le représentant de l'opposition a été élu grâce aux voix de quatre députés réfractaires du Likoud provoquant un vif émoi.
Ce d'autant plus que le représentant de la coalition n'a pas été élu.
Pour rattraper le coup, le combat se déplace sur la désignation du représentant du barreau, face à deux candidats. L'un, ancien bâtonnier peu scrupuleux et objet de poursuites pénales mais proche du Likoud, l'autre s'affichant ouvertement contre la réforme.
Les avocats israéliens devront choisir leur représentant dans un vote à haute tension politique.
Mais des voix s'élèvent contre cette faculté offerte à un avocat de faciliter la nomination de juges devant lesquels il va porter les dossiers de ses clients.
Face à cette mini fronde qui sévit au seing du Likoud, Netanyahu a tranché dans le vif sous le dictat évident de son ministre de la justice LEVINE lequel ne désempare pas malgré les critiques internes au Likoud.
La réforme se fera de façon unilatérale avant les prochaines vacations.
Et Netanyahu de déclarer: "Nous ferons cette réforme de façon mesurée et responsable conformément au mandat qui nous a été confié par les électeurs".
Tout ça pour ça!!
Exit les demi-mesures et les atermoiements. La réforme passera selon le projet initial dans toute sa brutalité.
Les faucons du Likoud ont repris la main.
Netanyahu ne sera pas invité à la Maison Blanche et devra affronter la ire populaire.
Quel est le programme?
Dans un premier temps, réduire le pouvoir de la Cour Suprême quant à la possibilité d'annulation des décisions politiques prises par la Knesset ou par le gouvernement, notamment quant à la désignation de ministres.
Ceci rendrait possible le retour d'Arié DERY, le ministre aux multiples casseroles judiciaires.
Ensuite, modifier les modalités de désignation des conseillers juridiques qui se prononcent sur la légalité des projets de décisions des ministres.
Une mise au pas sans précédent et se libérer ainsi de toute entrave.
« Les démocraties sont naturellement portées à concentrer toute la force sociale dans les mains du corps législatif. Celui-ci étant le pouvoir qui émane le plus directement du peuple, est aussi celui qui participe le plus de sa toute-puissance. On remarque donc en lui une tendance habituelle qui le porte à réunir toute espèce d’autorité dans son sein. Cette concentration des pouvoirs, en même temps qu’elle nuit singulièrement à la bonne conduite des affaires, fonde “le despotisme de la majorité”. »
Alexis de Tocqueville dans son ouvrage De la démocratie en Amérique (1835)
Les chiens aboient, la caravane passe.
Macron a fait passer sa réforme en force.
Dans dix ans on lui tressera des lauriers en vantant son courage politique et sa clairvoyance au service de la France.
Dans dix ans Netanyahu sera en prison si sa réforme ne passe pas. Même clairvoyance mais à son service personnel.
C'est toute la différence.
Un peu d'humour:
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