Lettre 216 Netanyahu chef de guerre

 A l’heure où le procès de Netanyahu vient de reprendre après une pause due à la situation de guerre, c’est le moment de faire le point sur son avenir politique.

Le radeau de la méduse (Théodore Géricault) 1818-1819

Le ministre de la justice Yariv LEVIN avait ordonné la suspension de toutes les affaires judiciaires non urgentes.

De nombreuses voix se sont élevées contre la reprise de ce procès en pleine guerre prétextant que la mobilisation risque d’entraver les auditions.

Est-ce bien le moment?

Car depuis le 7 octobre, ce n’est jamais le moment!!

Pas le moment de nommer une commission d’enquête. 

Pas le moment de limoger les officiers coupables d’aveuglement.

Pas le moment de formuler des critiques politiques qui divisent le peuple.

Netanyahu, a décrété l’union sacrée en repoussant ces questions à la fin d’une guerre qu’il annonce longue et difficile.

« Ensemble nous gagnerons! »

Tel est son slogan. Lui qui divisait le pays devient subitement le maître de l'union.

Il se veut chef de guerre, donc représentant de Tsahal, cette épine dorsale de la société israélienne.

Mais depuis deux mois, il n’est le bienvenu nul part, ni au pays, ni à l’étranger. L’incident face aux familles d’otages où il s’est fait lapidé avec forces vociférations démontre la fragilité de sa position.

Il ne se passe pas un jour sans que les journalistes l’interrogent sur sa possible démission. Il a fini par admettre que tous devront répondre de leurs actes y compris lui-même. Mais il a refusé d’assumer la responsabilité de l’hécatombe dont il avait déjà rejeter la faute sur l’armée avant de s’en excuser.

Et toujours de balayer la poussière sous le tapis et de tout renvoyer aux calendes grecques. (Les grecques n’ont jamais eu de calendes; chez les Romains il s’agit de la nouvelle lune donc le premier du mois lorsque leur calendrier était lunaire).

Il est vrai que le peuple est uni derrière ses soldats mais cette union indéfectible efface-t-elle les fractures qui irriguaient les mouvements politiques et sociétaux?

A en croire la doxa populaire, la carrière de Bibi est derrière lui et la fin de la guerre sonnera le glas de sa chute.

Belles paroles. D’autres estiment que Netanyahu joue son vatout et que le succès de l’opération, tant contre le Hamas que par la libération de tous les otages serait sa bouée de sauvetage.

Une troisième voix, voudrait qu’il pourrait encore partir la tête haute en renonçant à la politique contre une amnistie dans ses affaires pénales.

Dans l’immédiat, il s’accroche au pouvoir et le sentiment d’incertitude qui pèse sur lui est perceptible à chacune de ses interventions télévisées quotidiennes de mise au point de la situation militaire.

La question de sa compétence et de sa légitimité à mener cette guerre est en suspension dans l’air, lui qui est le principal responsable politique d’une conception qui a échoué et causé la plus grande extermination depuis la Shoah.

Responsable mais pas coupable.

Un homme politique, fut-il victime de mauvaises informations se doit de démissionner. 

Le 8 octobre aurait dû être le Yom À Din (יום הדין Jour du jugement) avec son départ de gré ou de force.

Mais le peuple sous le choc du massacre avait d’autres préoccupations et le citoyen israélien est pétri de bonnes intentions. (ילד טוב ירושלים Yeled Tov Yerouchalayim = bon enfant de Jérusalem. Se dit des personnes respectueuses en toutes choses et circonstances)

Donc on repousse les questions qui fâchent à plus tard et on se concentre sur les problèmes brûlants du jour. Et ils ne manquent pas.

En mettant la colère sous le boisseau, un véritable tsunami balaiera tous ceux qui de prêt ou de loin ont mis les mains dans le cambouis.

Parlons de cette responsabilité.

Tout était écrit, publié, filmé diffusé. Le Hamas avait préparé cette attaque au grand jour, avec de multiples exercices et entraînements visibles de tous.

Mais personne n’a pris ces prétentions au sérieux. Un scénario incroyable mais vrai. Une totale incurie. Un hubris exacerbé.

L’état major et les services de renseignements n’ont pas vu l’éléphant dans la pièce. Frappés de cécité. Ils ont méprisé les facultés d’un ennemi mortel et, par sentiment de supériorité, ont écarté d’un revers de manche les appels alarmistes des observateurs avisés de la section 8200.

Ça va proprement barder!!!

Parce que le risque est énorme: les otages risquent d’être abattus ( on en compte déjà plusieurs) et le sacrifice des soldats va enfler le vent de révolte, surtout si Hamas survit.

Le reproche principal contre Netanyahu, c’est d’avoir favorisé le Hamas pour affaiblir l’autorité palestinienne. Il a autorisé l’entrée de millions de dollars du Qatar, argent qui a servi en partie à la construction des tunnels et l’acquisition d’armes.

Le second reproche concerne la nomination d’un gouvernement de fracture menant une politique de rupture provoquant l’affaiblissement du pouvoir de la dissuasion militaire ce qui a mené au 7 octobre.

Le coup de boomerang sonne la fin de la récréation.

Cette politique est morte et enterrée. 

Sur le plan des sondages, le Likoud est en perte de vitesse manifeste que seul le remplacement de Bibi pourrait enrayer. Ce n'est pas tant le Likoud qui est en cause mais son dirigeant et quelques grandes gueules de bas étage.

Mais les prochaines élections n’auront pas lieu avant trois ans et personne ne semble vouloir couper la branche sur laquelle il est confortablement installé, de sorte qu’il y a peu de risque que 5 députés quittent la coalition pour priver Bibi d'une majorité.

Seul un évènement majeur pourrait changer la donne. Une révélation dramatique. 

Mais depuis deux mois, le peuple semble se satisfaire d’une situation temporaire bancale, d’un gouvernement qui vogue en eaux tumultueuses.

Serait-ce le radeau de La Méduse? (Théodore Géricault 1818 musée du Louvre)

Sur 150 naufragés, seuls 15 arrivèrent à bon port dans des souffrances indescriptibles.

Comparaison n'est pas raison.

Mais alors qu'il est de plus en plus question du "jour d'après", Netanyahu est-il l'homme de la situation.

Depuis qu'il est au pouvoir, presque 15 ans, il a toujours ménagé la chèvre et le chou sans jamais mener une politique visionnaire.

Il aime tant la Palestine qu’il en veut deux! Selon la stratégie "diviser pour régner". L’idée a fait du chemin puisque les deux Palestine sont en guerre à bas bruit rendant impossible l’édification d’un pays indépendant.

Mais cette guerre a paradoxalement redonné vie à thèse tel le phénix renaissant de ses cendres au grand dam de Bibi et de ses sbires de droite extrême.

Tous les pères fondateurs, Jabotinski et Ben Gourion, ont mené des batailles sans jamais omettre de rechercher des solutions diplomatiques par la négociation.

La Bande de Gaza était indépendante et doit le rester car nous n'avons pas vocation à occuper cette enclave sauf à assurer la sécurité jusqu'à solution politique.

Et les Américains verraient d'un bon œil qu'une solution globale permette de mettre en œuvre les accords d'Abraham avec une indépendance palestinienne qui inclurait une gouvernance commune Gaza-Judée  par l’autorité palestinienne. 

Mais sans le président actuel Abbas. Des élections? Selon un sondage, 80% des Palestiniens de Judée Samarie soutiennent le Hamas et approuvent le massacre du 7 octobre !!!

Mais le gouvernement actuel de « droite extrême » n'avalisera jamais une telle solution et préfèrera poursuivre l'occupation des deux entités.

Netanyahu déclare que Gaza ne sera ni ‘Hamastan ni ‘Fatastan. Mais il ne propose aucune solution en l’état. Et les Américains le pressent d'annoncer ses intentions sur le jour d'après.

Une gouvernance provisoire partagée entre Egypte et Israël? Gouvernance internationale? Il y a peu de volontaires.

La guerre semble donner à Netanyahu une seconde vie. "Pourvu que ça dure" disait madame Napoléon-mère.

A ceux qui prédisent sa chute, il répond "Le soleil se couche, le soleil se lève, encore un jour nouveau!"*

Durer quoi qu'il en coûte!

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* "Le soleil se lève, le soleil se couche; il soupire après le lieu d'où il se lève de nouveau." (L'ecclésiaste Version Louis Segond 1910)


Commentaires

  1. Cet homme tout sauf providentiel aura été une calamité pour ce pays mais probablement qu'un certain nombre ont intérêt à son maintient .
    L'implosion guette.


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